Les transferts culturels et l’histoire culturelle de la Grèce
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presque dix ans. Le plan de la nouvelle Athènes a été notamment dessiné
par Eduard von Schaubert, qui a été formé à l’Académie de Berlin, et l’ar-
chitecte bavarois Leo von Klenze fut l’auteur, parmi d’autres, d’un plan
de réaménagement de l’Acropole prévoyant notamment la construction
d’un palais royal. Cet engagement va de pair avec une certaine condes-
cendance dont le paroxysme est atteint dans les écrits de Jakob Philipp
Fallmerayer qui remet totalement en question l’existence d’une filiation
biologique depuis l’antiquité. Un des cas particulièrement spectaculaire
de contribution de l’Allemagne à l’État grec est celui du philologue spé-
cialiste de Pindare Friedrich Thiersch,
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qui après avoir été professeur à
Munich se déplace à Athènes. Friedrich Thiersch a étudié à Göttingen
et à Leipzig la philologie grecque, mais il est en Bavière depuis 1809 et
a fortement contribué à défendre les intérêts de la Bavière en Grèce. Il
s’est rendu en Grèce dès 1831. Il milite en faveur du néohumanisme et
en célèbre les mérites dans un ouvrage de 1838 qui présente les institu-
tions d’enseignement en Europe et accorde à l’Allemagne hellénisée une
place de choix. Il a ainsi publié en 1833 un ouvrage en deux volumes sur
la régénération de la Grèce. Dans le premier volume il évoque l’histoire
récente du pays et tout particulièrement la guerre de libération. Puis,
dans un second volume, il se penche sur les voies d’une régénération.
Il ne néglige pas l’agriculture ou les métiers, mais son attention s’arrête
bien évidemment sur l’enseignement. Il préconise naturellement l’étude
et l’imitation des auteurs anciens, et il est frappant que dans la partie
consacrée à l’Université le modèle allemand soit clairement affirmé. Les
privat-docents sont un complément indispensable aux rares titulaires de
chaires, et il faut faire largement appel à des étrangers : Il sera donc ques-
tion d’appeler à quelques places vacantes des savants de l’Europe, surtout
de jeunes professeurs allemands.
Si la participation allemande à la constitution de l’État grec et à son
organisation ne fait pas de doute, cette construction de la Grèce s’ac-
compagne d’une adaptation de l’apport allemand, comme, par exemple,
Stamatios Kléanthis qui a étudié en Allemagne mais est Grec accompagne
Schaubert dans son élaboration de plans concernant la nouvelle capitale.
C’est encore un architecte bavarois, Friedrich von Gärtner, qui a dessi-
né le Palais du roi Othon à Athènes, bâtiment occupé de nos jours par
13. Sandrine
M
aufroy
,
Le philhellénisme franco-allemand (1815-1848),
Belin,
Paris 2011.