Previous Page  49 / 482 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 49 / 482 Next Page
Page Background

MICHEL ESPAGNE

48

tir de la littérature contemporaine de l’Europe, comme si les écrivains

européens pourraient devenir les concurrents de Pindare ou de Platon

dans la constitution d’une littérature spécifiquement grecque. La rela-

tion de l’Europe à la Grèce peut au demeurant s’inverser. C’est aussi la

Grèce qui construit l’Allemagne du XIXe siècle dans ses traits essentiels.

Enfin dans la dynamique d’hellénisation qui caractérise le XIXe siècle un

rôle spécifique est dévolu à la diaspora. Car si les premiers gouverneurs

de la Grèce avaient, en bons philologues, dessiné comme au compas un

cercle dont le centre était Athènes, la réalité était assez différente, et c’est

d’Alexandrie, de Smyrne, du Phanar, de Paris, de Vienne et de Trieste,

bref de la diaspora historique ainsi que de la périphérie de l’État grec (de

Corfou ou de Crète), que s’est nourrie l’histoire grecque.

La question du transfert culturel constitutif paraît donc incontour-

nable. Des travaux sur la Grèce du XIXe ou du XXe siècle en contexte

européen

2

se réclament expressément des transferts culturels.

Un des phénomènes de transfert culturel les plus frappants dans l’his-

toire culturelle de la Grèce est certainement la question du philhellé-

nisme.

3

Le philhellénisme est une composante essentielle d’une histoire

culturelle européenne commune du XIXe siècle puisqu’il implique dans

une même mythologie collective, dans un même élan libérateur et colo-

nisateur à la fois, des Grecs, des Français, des Allemands, des Suisses,

des Anglais. Il y a peu d’événements du même type dans l’histoire de

l’Europe :

Le voyage du jeune Anacharsis

de l’abbé Barthélemy (1787),

traduite en allemand dès 1792, en grec en 1797,

4

ou le

Voyage pittoresque

2. Chryssoula

K

ambas

et Marilisa

M

itsou

,

Hellas verstehen, deutsch-grie-

chischer Kulturtransfer im 20. Jahrhundert

, Köln-Weimar, Böhlau 2010 ; Ourania

P

olycandrioti

, « Lectures pour enfants. Productions originales et traductions au

XIXe siècle en Grèce »,

The Historical Review / La Revue Historique

, Section de

Recherches Néohelléniques / Institut de Recherches Historiques, 12 (2015), 101-123.

3. Sur la question voir déjà le numéro 1-2/2005 de la

Revue germanique

internationale

,

Philhellénismes et transferts culturels dans l’Europe du XIXe

siècle

, éd. par M. Espagne et G. Pécout.

4.

Nέος Aνάχαρσις.

Eισαγωγή – Eπιμέλεια – Σχόλια: Άννα

T

αμπάκη

, Bουλή των

Eλλήνων, σειρά «Pήγα Bελεστινλή Άπαντα τα Σωζόμενα», τόμος Δ´, 1η έκδ., Aθή-

να 2000 (2η έκδ. 2003) [

Nouvel Anacharsis.

Introduction – Édition – Commen-

taires : Anna Tabaki, Éditions du Parlement Hellénique, série : « Rhigas Véles-

tinlis, Œuvres complètes », t. 4, 1ère éd., Athènes 2000 (2ème éd. 2003)]. Une

seconde traduction sera effectuée en 1819.