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Les transferts culturels et l’histoire culturelle de la Grèce

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poèmes traduits dont certains en cinq versions différentes– et même tout

poète qui comme Elytis s’en réclame ramène au sein de l’espace littéraire

grec des textes qui en proviennent. Des Grecs traduisent des Allemands

traduisant des Grecs ou imitent des Allemands imitant des Grecs. Le pro-

blème de la réimportation caractéristique des transferts culturels pose

une fois encore le problème de ce que l’exportation est celle d’une littéra-

ture antique alors que la réimportation est celle d’une littérature vivante.

Ce qui vaut pour la littérature grecque moderne est

a fortiori

valable

pour la littérature française moderne dans ses relations avec le philhellé-

nisme allemand. L’histoire des lectures et traductions françaises de Höl-

derlin, de Bousquet à René Char, concerne tout particulièrement la per-

ception de la Grèce et est sans aucun doute un des éléments structurants

du lyrisme français du XXe siècle.

Un transfert plus complexe encore pourrait être celui qui résulte de

l’usage du néo-classicisme français au tournant de 1800 et de son ins-

piration grecque. Les poèmes de Parny et de Chénier transposent dans

la littérature française du temps des thèmes grecs même s’il ne s’agit

pas à proprement parler de traductions. Ces thèmes grecs ont un destin

posthume non pas en France même où ils sont largement oubliés mais en

Russie où ils ont été traduits par les principaux représentants du roman-

tisme russe de Pouchkine à Batiouchkov. S’il existait bien, et c’est ici une

pure conjecture, des versions en grec de ces traductions et poésies pouch-

kiniennes, elles sont le résultat d’un long cheminement à travers les litté-

ratures européennes, chaque étape ayant laissé une strate interprétative.

Parmi les figures fondatrices de la littérature grecque celle d’Alexandre

Papadiamandis mérite d’être particulièrement évoquée, non seulement

parce qu’il avait acquis la connaissance de l’anglais et du français, parce

qu’il appréciait particulièrement Shakespeare et connaissait bien la tra-

dition du roman historique, mais encore parce qu’il traduisit beaucoup

d’articles pour de grands journaux grecs ou des textes littéraires. Par

exemple le roman

Crime et Châtiment

de Dostoievski ou des nouvelles de

Tchekhov, sans doute à partir de versions dans une langue qu’il connais-

sait. Même chez un représentant de la société grecque traditionnelle et

de la foi orthodoxe l’écriture littéraire reposait sur des échanges perma-

nents avec d’autres littératures européennes.

Pour ne parler que du XIXe siècle, tout au long du siècle une forte

partie de l’élite intellectuelle grecque a suivi des études à l’étranger, de

Paparrigopoulos qui suivit l’enseignement du lycée français d’Odessa